Par Arlette Soudan-Nonault, Ministre du Tourisme et de l’Environnement.
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S’il est une chose que la pandémie du coronavirus Covid-19 nous rappelle chaque jour, c’est que notre planète n’est pas seulement interconnectée, elle est interdépendante. Une chauve-souris contamine un mammifère, ce mammifère est vendu sur un marché chinois, il infecte ceux qui le consomment et en quelques semaines le monde entier est atteint, y compris notre pays, le Congo.
Sur les hautes instructions du Chef de l’Etat, SE Denis Sassou Nguesso, le Premier Ministre et son gouvernement ont très tôt réagi face à l’inévitable extension de la menace. Des mesures drastiques que chacun est tenu de respecter ont été prises pour nous protéger.
Une task force ministérielle a été mise en place pour gérer et atténuer les conséquences sanitaires, sociales et économiques de cette situation de crise. Faisons lui confiance.
Mais alors que les philosophes et les sociologues débattent déjà sur « le monde d’après le coronavirus », qui sera nous assurent-ils très différent du monde d’avant, l’heure est plus que jamais à la responsabilité individuelle.
La Ministre de l’Environnement que je suis a été, comme beaucoup d’écologistes, interpellée par la lecture d’une toute récente étude de la Société italienne de médecine environnementale, qui établit un lien direct entre la dégradation accélérée de notre environnement et la propagation du Covid-19. Selon cette étude, la pollution de l’air et des sols offre une « autoroute » au coronavirus en jouant un rôle d’accélérateur pour sa diffusion.
Non seulement la pollution fragilise l’état de santé des populations confrontées à l’épidémie, mais elle favorise son expansion.
Le rôle de la pollution dans la transmission des virus était déjà connu des chercheurs et documenté. Il est désormais évident. Par ailleurs, ainsi que l’indique l’économiste et spécialiste du développement durable Laurence Tubiana, « le dérèglement climatique est un vrai multiplicateur de menaces, y compris virales ». Enfin, s’ajoutent à cela les conséquences néfastes de la déforestation qui de plus en plus met en contact direct l’homme et la faune sauvage, ainsi que l’état d’insalubrité de nos décharges à ciel ouvert, véritables réservoirs de virus et d’espèces d’insectes jusqu’ici inconnues.
Depuis la parution de cette étude italienne au début de la pandémie, la quasi mise à l’arrêt de l’économie mondiale a eu pour conséquence une diminution spectaculaire des émissions de carbone à travers la planète, donc de la pollution de l’air. Même si cela peut sembler paradoxal de le dire, c’est une bonne chose pour la santé publique. La surmortalité due chaque année à la pollution atmosphérique se chiffre en effet en dizaines de millions d’êtres humains.
Mais c’est évidemment une très mauvaise nouvelle pour l’économie, le développement et les échanges. Pour autant, quand nous sortirons de cette crise – et nous en sortirons tôt ou tard- tout devra-t-il repartir exactement comme avant ? Je ne le crois pas. L’erreur en effet serait de ne pas rendre durable la modification de nos comportements imposée par la pandémie, de faire rebondir les émissions de Co2 à la hausse et de ne pas saisir l’occasion pour progresser encore plus vite vers une économie décarbonée. Comme l’a dit Barack Obama : « une crise, c’est une opportunité ».
Ce n’est pas l’urgence climatique qui nous y oblige aujourd’hui, mais l’urgence épidémique. Pour freiner la propagation du virus, il nous faut impérativement assainir nos villes, en finir avec les poubelles qui débordent, les ordures qui encombrent nos caniveaux, les étals à même le sol, la commercialisation illégale de la viande de brousse, les marchés insalubres où l’on se presse et se bouscule dans le plus grand désordre. Il faut apprendre à aérer et à désinfecter nos habitations, à cesser de se rendre en groupe au chevet des malades.
Soyons responsables, n’attendons pas des autorités qu’elles fassent à notre place les gestes citoyens qui nous incombent. Une ville n’est pas sale en elle-même, elle est salie par ses habitants.
Les gestes barrières contre le virus ne sont pas seulement ceux qu’indique l’OMS et qu’il faut absolument appliquer. Ils concernent aussi notre culture et notre sociabilité traditionnelles.
Les rassemblements religieux, les veillées, les mariages, les transports en commun sont des hauts lieux de propagation de n’importe quelle épidémie, à commencer par celle du Covid-19. Je sais que ce n’est pas facile et que beaucoup n’ont guère le choix des moyens. Mais limiter le nombre de personnes assistant à des cérémonies, se tenir partout à distance l’un de l’autre, ne plus se serrer la main, ni s’embrasser ou se toucher le front tant que plane la menace, ces comportements de survie sont-ils impossibles ? Je ne le pense pas.
Depuis que le gouvernement a décrété la fermeture des dancings, des VIP et des Caves, afin d’éviter une promiscuité potentiellement contagieuse, certains de ces établissements continuent de fonctionner clandestinement à l’abri des portes closes. Dans les hôtels réquisitionnés pour y confiner les voyageurs de retour au Congo, certains individus s’autorisent à inviter des ami(e)s dans leurs chambres pour boire un verre ou y passer la nuit et s’en vantent sur les réseaux sociaux.
Ces comportements inadmissibles et irresponsables qu’il m’a été donné de connaître en tant que Ministre de tutelle en charge du Tourisme et des Loisirs, montrent l’ampleur du travail de pédagogie qui reste à accomplir. Ils doivent en attendant être sanctionnés sans faiblesse.
Pour terminer, gardons-nous de trois maux hélas propagés par les réseaux sociaux à la même vitesse que se propage le virus. L’incrédulité tout d’abord. Répétons-le une fois pour toutes : ce virus frappe les Noirs comme les Blancs, les forts comme les faibles, les jeunes comme les vieux, les femmes comme les hommes, les riches comme les pauvres, qu’il fasse froid ou qu’il fasse chaud.
La stigmatisation ensuite : c’est une maladie contagieuse certes, d’où l’obligation de confiner ceux qui en sont atteint, mais ce n’est pas une maladie honteuse, pas plus que le paludisme, la grippe ou la dysenterie. Enfin, sachons que pour l’évaluer et la traiter seuls comptent le langage et la compétence des médecins et des professionnels de santé.
Les charlatans, les complotistes de l’internet, les faux pasteurs et les pseudos guérisseurs qui vous proposent des remèdes miracle sont à fuir comme le coronavirus.
Cette période difficile, pendant laquelle le navire Congo ne peut que se louer d’avoir, en la personne de Denis Sassou Nguesso, un capitaine d’exception rompu à toutes les tempêtes, nous oblige à prendre soin de notre environnement et à modifier nos comportements dans un sens plus responsable, plus solidaire et plus respectueux des autres.
C’est à cette condition aussi que nous sortirons de cette épreuve plus forts et plus unis